Pastiches

Valsatroce

(Pastiche de l’Albatros de Baudelaire)

Souvent pour s’amuser, les hommes d’influence
Prennent des ministres castrés, médusés, des maires
Qui suivent, insolents compagnons d’opulence
La politique glissant sur des gouffres amers

A peine le pantin coincé entre les planches
Que cette caricature, maladroit et honteux
Laisse piteusement ses espoirs, flanche
Comme si son avenir était tout aux dieux

Ce valseur emmêlé, comme il est gauche et veule
Lui naguère si bobo, qu’il est comique et laid
L’instant de grâce est sec et sa cruelle gueule
Mime le citoyen infirme que les firmes ont volé

Le Français est semblable au prince des huées
Qui vante la tempête et subit les marchés
La tête vers le sol, se mettant à suer
Son cerveau de gland l’empêche de rêver


La dormeuse du râle

(Pastiche du dormeur du Val de Rimbaud)

C’est un val fourré où pleure une rivière,
Accrochant follement ses baillons
Détergent ; où la misère castagne fière,
Luit : c’est une petite, mal, qu’on détrousse de ses rayons.

Un sot de la dale, jeune, bouche ouverte, fesses nues,
Et la queue saignant dans le frais cresson bleu,
Porc ; il bande comme une merde, sous l’inconnue,
Pâle dans sa cave, pervers où la lumière pleut.

Avec  ses potes et non seul, il est fort. Souriant comme
Souriraient des enfants malades, ils font une somme :
Pâture, branle-les chaudement : elle a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Elle vomit même le soleil, des mains sur sa poitrine,
Eux tranquilles. Deux trous rouges tachent cette proie


La maison murée

(Pastiche de San Francisco de Le Forestier)

C’est une maison murée
Adossée au centre ville
Si t’y remets les pieds, on te frappera
Ceux qui vivaient là, ont du voler la clé
Se retrouvaient ensemble
Après des années de route
Ils venaient s’asseoir autour du repas
Maintenant les parpaings montent jusqu’à la voute

Sans toit à Poitiers on s’enrhume
San Toit à Poitiers des feux s’allument
San toit à Poitiers, que faites vous
Clayes, le préfet, les juges, entendez moi

Errant dans le brouillard
glacé, se blottissant dans l’herbe
On leur avait ouvert la porte d’un espoir
Quelles sont froides désormais toutes ces nuits noires
Une autre s’ouvrira
pas le choix quand c’est le ciel
Qui nous sert de toit depuis un an ou deux
Et nous les gens heureux, on s’endort déjà

Sans toit à Poitiers on crève, sans toit à Poitiers on crève
Sans toi à Poitiers ! Que faites vous
Clayes, le préfet, les juges…. Entendez-moi

C’est une maison murée
Accrochée à nos mémoires
Si t’y remet les pieds, on te frappera
Ceux qui vivaient là avaient du voler la clé
Peuplée de mineurs isolés
De quelques lits et trucs pratiques
Elle est privée de lumière, condamnée par des fous
Notre humanité peine à rester debout

Si le cœur à Poitiers s’effondre
Si le cœur à Poitiers s’effondre
San cœur à Poitiers! Que faites vous
Clayes, le préfet, les juges, entendez-moi


Trompettes des confinés

(Pastiche de « Trompettes de la renommée » de Brassens)

Je vis mon confinement, loin de la place publique
Un peu dubitatif, et quand même colérique
Et quand je m’ennuie un peu, je passe sur internet
Et là grande surprise, je n’fais que voir vos têtes
C’est pas qu’elles sont pas belles, que c’est rébarbatif
Mais quand tous vos amis, se disent des créatifs
Pour eux vous n’êtes plus, qu’un simple réceptacle
Et tous les jours au fond, c’est le même spectacle

Facettes… Des egos développés
Vite faut pas que j’reste connecté

Avec une guitare, ou d’autres instruments
Ils poussent la chansonnette, en chantant fièrement
Attendant certainement, qu’on leur dise que c’est beau
Qu’ils sont des vrais poètes, des répliques de Rimbaud
Yen a qui font des clips, et les mettent sur Youtube
Une belle fille, un chic type, nous offre une interlude
En s’mettant presque à poil, vêtus de robes de chambre
Verra t’on leurs tétons, si elles s’mettent à descendre

Facettes… Des egos développés
Vite faut pas que j’reste connecté

On dirait que certains, sont des sosies d’ermite
Sont des poissons dans l’eau, quand chauffe la marmite
Affichent leur bonheur, de glander tranquillement
Car ça fait des années, qu’ils prennent des calmants
Yen a qui tous les jours, écrivent des poèmes
Et nous parle de l’amour, plutôt que de leur flemme
Leurs larmes mouillent le bois, et éteignent la flamme
Sortez donc et allez, rejoindre cette femme

Facettes… Des egos développés
Vite faut pas que j’reste connecté

Un bon pote du mellois, assez féru de sport
Fait des tours de maison, pour faire suer ses pores
Mais dès qu’il en marre, il part se faire la belle
Et profite du printemps, sur les rives de la Belle
Qu’il profite du grand air, je trouve ça plutôt chouette
Mais c’est presque impudique, comme des câlins sous la couette
Quand on pense à tous ceux, qui n’ont que leur balcon
Et ont la bonne idée, d’y faire leur marathon

Facettes… Des egos développés
Vite faut pas que j’reste connecté

Certains mettent en scène, carrément leurs enfants
Ou mettent en ligne leur ligne, reclus en s’affinant
Ne parlons pas de ceux, qui cuisinent comme des chefs
Photographient leurs plats, ne manquant pas d’relief
Moi qui arrête la clope, et qui sort d’une couvade
Qui habitant en ville, n’a pour seule promenade
Quelques allers retours, dans mon petit jardin
Ma bouée a devant elle, de jolis lendemains

Facettes… Des egos développés
Vite faut pas que j’reste connecté

Sous prétexte de culture, voir même de nostalgie
On sort de vieilles photos, où l’on souffle nos bougies
On cite les films qu’on aime, on publie pleins de listes
Et les publicitaires, remontent toutes les pistes
Pour attirer les foules, pour avoir votre égard
Dois-je annoncer en boucle, que mon couple se sépare
Ou pire encore je crois, afficher notre amour
Et rendre bien jaloux, les chiens fous, les vautours

Facettes… Des egos développés
Vite faut pas que j’reste connecté

Que tu veuilles faire le buzz, en cette période obscure
Ou que tu veuilles distraire, ton ennui le plus pur
Plutôt que d’amener, tous les gens dans ta ronde
Viens me parler à moi, plutôt qu’à tout le monde
Toute cette modernité, a quand même pour limite
D’émietter nos rapports, d’installer une vitre
Comme si tous tes contacts, avaient la même valeur
Et que de prisonnier, tu passais à voleur

Facettes… Des egos développés
Vite faut pas que j’reste connecté

Moi-même je suis fautif, la preuve avec ce texte
Peut-être au fond n’est-il, qu’un maladroit prétexte
Oui pour que tu m’appelles, ou me donne des infos
Ou pour quitter vraiment, ces réseaux asociaux
Entre sa vérité, et sa part de provoc
Qu’il soit vous un rien, ou un électrochoc
N’oubliez pas qu’en tant, que très mauvais chrétien
Moi plus je vous aime et, plus je vous châtie bien

Facettes… Des egos développés
Vite faut pas que j’reste connecté


L’or à son âge

(Pastiche de « l’Orage » de Brassens)

Parlez moi de ma fille, non pas de confinement
Les gouvernants m’dégoutent et m’font grincer des dents
Tous ces médias me mettent en rage
Alors comme cet amour est désormais sur terre
Pour son second printemps, j’oublie donc Jupiter
Pour ne pas devenir barge

Par un beau mois d’avril, pour tes quatorze mois
Je profite de tes rires, qui me laissent tout pantois
Et de tes tous premiers caprices
Quand je change tes couches, ça brise un peu l’ennui
Dieu merci d’puis deux mois, tu fais enfin tes nuits
Fini tes sirènes de police

Tu ne peux rester seule, faut toujours t’occuper
Bien bavarde comme ta mère, papa quel dur métier
Pauvre malheureux père pépère
Contraint de répéter, ça quelque soit le temps
Au moins vingt fois par jour, les même histoires qu’maman
Sinon tu deviens trop vénère

N’empêche qu’avec cette drôle histoire de pangolin
Tu t’réfugies sans cesse entre nos bras câlins
En profitant pour faire des tests
Tes grands cris bien stridents raisonnent dans la maison
Tu grimpes un peu partout, sans t’soucier d’l’horizon
Arracher les feuilles on déteste

Avec ton lopinou, bien assise en tailleur
Parfois tu nous observes l’esprit un peu ailleurs
Et on sent bien qu’tu prends de l’âge
Que le bébé en toi, p’tit à p’tit se tarit
Qu’une métamorphose s’opère quand tu souris
Presque prête à prendre le large

Car depuis quelques jours, le quatre pattes c’est trop peu
tu t’mets souvent debout pour t’élever un peu
Prête à partir vers l’inconnu
Je te sens bien focus, ma petite Vénus
A marcher un p’tit peu, façon roulette russe
Avec quelques chutes au menu

Ça sent le paradis, en cette période d’enfer
Avec mademoiselle, on sait toujours quoi faire
C’est bien mieux qu’d’être millionnaire
De se filmer sans cesse près d’une belle mer bleue
Ça pousse dans mon jardin, même les jours où il pleut
Et on câline bien sa mère

Dieu si je ne porte pas plainte, je me ferai combattant
Ne crois pas Jupiter, qu’avec ce confinement
On n’te tiendra pas tête ensemble
L’Histoire, elle contera, qu’tu es un assassin
Qui assèche les cœurs, et dont le seul dessein
Est une France fanée qui te ressemble

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